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Longtemps après, en 1695, le célèbre commissaire général des fortifications, Sébastien Le Prestre de Vauban, ayant repéré le site de Châteauneuf lors d’une de ses inspections dans la région malouine, confirma l’intérêt stratégique de l’isthme de Châteauneuf. Il le qualifia alors de « Position militaire importante pour la défense de la province de Bretagne »
Le site castelnovien est complexe et résulte des enchevêtrements de styles architecturaux témoins des différentes campagnes de construction ou d’aménagement. La difficulté à restituer les transformations et l’évolution du site castral de Châteauneuf au cours de ses dix siècles d’existence réside notamment dans cette complexité stylistique mais aussi du fait des lacunes des ressources archivistiques du château. Toutefois, la possibilité de restitution de l’évolution architecturale d’un site doit pouvoir se faire en regard du contexte historique, géographique et social du lieu étudié.
Le village de Châteauneuf et son château sont implantés sur cette langue rocheuse axée nord sud et dont la nature du roc est constituée de schiste gris bleu. L’assiette du château, sur laquelle prennent place différents bâtiments, correspond au point culminant de cet isthme rocheux, soit 22 m. d’altitude au-dessus du niveau de la mer. L’ensemble du site castral, dans son état actuel, se compose du logis seigneurial, de la chapelle castrale aujourd’hui église paroissiale, du « Petit Château » ou malouinière, des communs (écurie et orangerie), de la métairie et d’une partie de ses anciens jardins.
La période couvrant les XVIe et XVIIe siècles, amorce un changement significatif pour Châteauneuf.
En 1548, le troisième fils de Jean IV, Jean de Rieux (1507-1563) hérite de la seigneurie de Châteauneuf après l’extinction de la branche aînée morbihannaise, et décide alors d’en faire son fief principal. Il entreprend d’important travaux de réaménagement afin de transformer cette ancienne forteresse en un lieu de résidence conforme au goût stylistique de son époque.
Les Rieux menaient grande vie auprès des rois de France et la cour de Châteauneuf était connue en son temps. Les écrits de deux seigneurs vivants dans la région, et redécouverts entre la fin du XIXe et le début du XXe siècle, nous ont laissé un témoignage indéniable. Le premier, est un Journal écrit par François Grignart (1551-1607), écuyer sieur de Champsavoy près d’Evran, qui relate aussi bien sa vie personnelle que les événements historiques et politiques vécus en Bretagne et en France, à cette époque troublée par les guerres de Religion. François Grignart entra dans la suite de « Monsieur de Châteauneuf » (Guy Ier de Rieux) en 1576, et prit le parti des armes pour le roi en combattant auprès de son seigneur. Le second écrit sont les mémoires du sieur Charles de Gouyon (1553-1587), intitulées « Brief discours de la vie de Madame Claude du Chastel, dame de la Moussaye », commencées en 1562 et finissant en 1585. C’est un observateur privilégié des mœurs de cette noblesse du XVIe siècle puisque lui-même appartient à la noblesse bretonne de haut rang. Tous deux évoquent dans leurs écrits la cour de Châteauneuf et les nombreux déplacements des membres de la famille de Rieux dans leurs diverses propriétés. François Grignart mentionne même les relations politiques que Guy Ier entretenait avec le duc de Mercœur en pleine guerre de la Ligue et son intervention pour tenter de retrouver enfin le paix en Bretagne. De plus, ces deux documents sont de bons indicateurs concernant les mœurs de la noblesse bretonne à la fin du XVIe siècle.
CONCLUSION :
Depuis le milieu du XVIIIe siècle, le site castral de Châteauneuf a été peu modifié. L’actuel propriétaire du château de Châteauneuf s’attache à restaurer avec soin ce monument chargé d’histoires, qui n’est pas ouvert à la visite. Ce site présente un intérêt architectural non négligeable en raison de la diversité de styles architecturaux qui se succèdent sur un même espace et permettent d’observer une évolution continue depuis le XIe siècle.
Comme beaucoup d’autres châteaux ayant un important passé militaire, les progrès de l’artillerie ainsi que les bouleversements politiques et sociaux de la fin du XVIe siècle ont amorcé la démilitarisation du château de Châteauneuf qui se transforma progressivement en demeure de plaisance. C’est l’exemple typique de la transformation d’un ancien site à vocation défensive en lieu de plaisance et de villégiature. Ce château, qui témoigne de ce phénomène de mutation, fait émerger une problématique reposant sur la réutilisation en Bretagne, d’anciens sites défensifs à caractère militaire et leur transformation en lieu de résidence.
De plus, l’existence de ce château est fortement marquée par une lignée de propriétaires, seigneurs de Châteauneuf pendant plus de 250 ans, les Rieux, qui pourraient faire l’objet d’une étude approfondie.
REPÈRES CHRONOLOGIQUES :
1047 1057 | première mention de l’existence d’un lieu fortifié à Châteauneuf, attestée dans une charte de Saint-Georges de Rennes qui autorise la fondation d’un castellum à Nulliac, dans la vicomté d’Alet. |
1117 | lieu fortifié reconstruit sous les directives de Henri Ier, roi d’Angleterre et duc de Normandie, après un accord passé avec Conan III. Poste anglo-breton appelé château de Bure, comportant un donjon quadrangulaire construit en pierre. |
1118 | mort de Baudouin VII, comte de Flandre, dit « la Hache » au pied du donjon, lors d’une attaque des troupes françaises sur la Bretagne. |
1181 | première mention faite de la forteresse de Châteauneuf, sous le nom de castellum de Nœs, dans l’enquête par Tourbe sur les domaines temporels de l’évêché de Dol. |
vers 1250 | première mention d’un seigneur de Châteauneuf nommé Thébaud de Rochefort. |
1351 | Bertrand du Guesclin et sa troupe s’établissent dans la forteresse de Châteauneuf de la Nouée, connue aussi sous le nom de Chasteauneuf de la Noe. Des travaux entrepris entre 1341 et 1381, améliorent l’aspect défensif de la forteresse. |
1374 | Jeanne, Dame de Rochefort et de Châteauneuf épouse Jean II de Rieux, maréchal de France. Par cette union Châteauneuf entre dans la famille de Rieux jusqu’à sa vente en 1681. |
1441 | date de réfection du château suite à la levée d’un impôt par Jeanne, Dame de Rochefort et de Châteauneuf, à partir de 1420, en ses terres et baronnies pour la réparation de ses forteresse.Date d’érection de la terre de Châteauneuf en baronnie. |
1489 | les Français s’emparent de la forteresse. |
1589 | le château est pris par les troupes du duc de Mercoeur (1558-1602). |
1591 | Châteauneuf abrite une compagnie de ligueurs de 50 arquebusiers à pied. |
1592 | en mars, une garnison royaliste sous le commandement du capitaine La Touraine est établie dans la place de Châteauneuf. Puis, les ligueurs, ayant repris possession des lieux en octobre, commencent à démilitariser la forteresse en décembre. Le donjon est en partie détruit et les canons aux armes des Rieux sont transférés à Saint-Malo. |
1594 | sur ordre du roi Henri IV la forteresse est démantelée. |
avant 1610 | reconstruction du logis par Guy II de Rieux, fils de Guy Ier et jugement à la Cour du Parlement suite aux doléances des habitants s’opposant à cette réédification. |
vers 1625-1630 | édification du « Petit Château » ou « Château Neuf », actuelle malouinière. |
1681 | vente judiciaire de la seigneurie de Châteauneuf et autres propriétés de la famille de Rieux, qui furent saisies par leurs créanciers. (Procès verbal du 22 septembre 1681) |
1704 | la seigneurie de Châteauneuf est érigée en marquisat par Louis XIV, en faveur de Jacques-Louis de Béringhen, Ier écuyer du roi. La juridiction de la seigneurie se composait de 55 bailliages et s’étendait alors sur plus de 25 paroisses. |
vers 1730 | le « Petit Château » est agrandi par la famille de Béringhen qui y accole un bâtiment de type malouinière. |
1740 | vente de la seigneurie par Henry-Camille de Béringhen à Etienne-Auguste Baude, seigneur de la Vieuville, issu d’une famille de riches négociants malouins. Il entreprend de supprimer définitivement le donjon ainsi que l’enceinte médiévale subsistant de la forteresse, et dresse les plans du parc, le plus long de Haute-Bretagne au XVIIIe. |
1791 | le 22 janvier, une troupe de 500 hommes armés envahit le château et brûle des archives provenant de la seigneurie de Coëtquen. |
1793 | Monsieur de la Vieuville est arrêté puis est conduit à Rennes où il est guillotiné le 15 floréal de l’an II, le 4 mai 1794, alors âgé de 81 ans. |
1858 | le fils du marquis de la Vieuville vend la propriété à Auguste Latimier du Clésieux. |
vers 1880 1890 | le propriétaire, le marquis d’Audiffret-Pasquier fait rénover le château par un architecte venu de Paris, les travaux de restauration sont entrepris surtout pour consolider l’ancien logis |
1910 et 1921 | la famille d’Audiffret-Pasquier vend les biens mobiliers du château à l’encan à un négociant puis vend l’ensemble de la propriété en 1921. |
1930 | Inscription des restes du vieux château sur l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques. |
1992 | le 10 avril, Inscription du vieux château, de la malouinière et de l’ancien jardin sur l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques. |
1993 | le 2 octobre, les éléments bâtis du château et de la malouinière ainsi que l’ancien jardin sont classés parmi les Monuments Historiques. |